Glucides : qui en a vraiment besoin ? Pas la grande majorité des athlètes.

Glucides : qui en a vraiment besoin ? Pas la grande majorité des athlètes.

Publié par ALVARO MADRAZO le

Introduction

Pendant des décennies, on a expliqué aux coureurs qu’il fallait se gaver de glucides pour survivre aux longues distances.
Gels, boissons isotoniques, repas de carb-loading : tout cela est devenu une sorte de dogme dans la culture de l’endurance.

Mais voici la vérité, sans détour :

À moins d’être un athlète élite courant proche de ses limites physiologiques, tu n’as pas besoin d’inonder ton corps de sucre pour bien finir une course.

En réalité, la majorité des coureurs — oui, l’écrasante majorité — pourraient améliorer leurs performances, réduire les troubles digestifs et éviter les coups de fatigue en s’alimentant plus intelligemment.
Cela implique de repenser la dépendance excessive aux glucides.

Cet article s’adresse aux 95 % de coureurs qui ne courent pas un marathon en moins de 2h30.
Nous allons voir comment le corps produit réellement de l’énergie, ce que demandent les différents niveaux d’intensité, et pourquoi les lipides — ton carburant le plus puissant — sont largement sous-estimés.

Prêt à courir plus intelligemment, pas simplement plus sucré ?
Entrons dans le sujet.


Les voies métaboliques : comment ton corps produit réellement de l’énergie

Le corps humain dispose de plusieurs systèmes énergétiques.
La plupart des discussions sur le ravitaillement en marathon se focalisent uniquement sur les glucides — mais ce n’est qu’une partie de l’équation.

Prenons une approche un peu plus scientifique.


Oxydation des glucides

– Source rapide d’ATP (la monnaie énergétique des cellules)
– Dépend du glucose sanguin et du glycogène stocké dans les muscles et le foie
– Les réserves de glycogène sont limitées : environ 400 à 500 g au total
– Devient dominante à très haute intensité (> 70 % du VO₂ max)

👉 Parfait pour des efforts courts ou des allures élite.
👉 Pas conçu pour durer longtemps à intensité sous-maximale.


Oxydation des lipides

Longtemps considérée comme « lente », cette vision est aujourd’hui dépassée chez les athlètes entraînés.

– Un coureur d’endurance entraîné oxyde environ 0,8 g de lipides par minute
– Un athlète adapté aux graisses peut atteindre 1,5 g/min
– Même un athlète très sec transporte plus de 50 000 kcal sous forme de graisse
– Principalement utilisée à ≤ 70 % du VO₂ max

👉 Une source d’énergie stable, puissante et quasi illimitée.
👉 Idéale pour le marathon et l’ultra-endurance.


Utilisation du lactate

Souvent mal compris, le lactate n’est pas un déchet.

C’est un sous-produit du métabolisme des glucides, que le corps recycle très efficacement.
Le cœur, le cerveau et les muscles l’utilisent comme carburant, notamment autour du seuil lactique.

👉 Un carburant flexible et performant, quand il est bien géré.


Exemple concret : marathon en 3h avec une répartition 50 % glucides / 50 % lipides

Faisons les calculs.

Athlète :
– Homme, 70 kg
– Marathon en 3 heures
– Répartition énergétique : 50 % glucides / 50 % lipides

Dépense énergétique totale :
42,195 km × 70 kcal/km ≈ 2954 kcal

Apport via les glucides :
1477 kcal ÷ 4 = ≈ 369 g de glucides
➡️ ≈ 123 g/heure

Apport via les lipides :
1477 kcal ÷ 9 = ≈ 164 g de lipides
➡️ ≈ 55 g/heure

Point clé

L’intestin peut absorber environ 90 à 120 g de glucides par heure, dans le meilleur des cas.
Au-delà, l’organisme doit compter sur :
– le glycogène interne
– l’oxydation des lipides

Avec une oxydation des graisses entre 0,8 et 1,5 g/min, un athlète entraîné peut couvrir jusqu’à la moitié de ses besoins énergétiques grâce aux lipides.

👉 Il n’est pas nécessaire de surcharger en glucides pour performer.
👉 Il faut s’alimenter selon le fonctionnement réel du corps.


Marathon et ultra : la réalité énergétique

Détruisons un mythe : seuls environ 5 % des marathoniens courent au-dessus de 70 % du VO₂ max, là où les glucides deviennent indispensables.

Cela signifie que 95 % des coureurs évoluent dans une zone où les lipides devraient assurer l’essentiel du travail.

Continuer à carb-loader comme un cycliste du Tour de France n’est pas seulement inutile :
c’est souvent la meilleure façon de ruiner son système digestif et de provoquer un crash.


De combien de glucides as-tu réellement besoin ?

Reprenons notre marathonien en 3 heures.

Avec une répartition 50/50 :
10 à 30 g de glucides par heure suffisent pour stabiliser la glycémie
– le glycogène et les lipides font le reste

Alors, qui a réellement besoin de 60 g/h ou plus ?

👉 Une infime minorité d’athlètes élite courant à haute intensité de façon continue.
Pour tous les autres, ce niveau d’apport est inutile — voire contre-productif.


Ultra-trail : le territoire naturel des lipides

Au-delà de 6 heures d’effort, la logique change encore davantage.

– Plus la course est longue, plus l’intensité baisse
– Plus l’intensité baisse, plus l’utilisation des lipides augmente

Dans ce contexte, 10 à 30 g de glucides par heure suffisent largement à maintenir une glycémie stable.

Le vrai danger n’est pas le manque d’énergie.
👉 C’est la destruction du système digestif.

Réalité terrain

Les recommandations en glucides n’ont cessé d’augmenter.
Pourtant, les troubles gastro-intestinaux restent la première cause d’abandon en ultra.

👉 Plus de sucre ≠ plus de réussite.
👉 Protéger son intestin, développer sa flexibilité métabolique et faire confiance aux lipides est souvent la clé.


Tableau récapitulatif : qui a vraiment besoin de glucides ?

Arrête de copier les élites.

Profil Compléments glucidiques nécessaires ? Pourquoi
Marathon > 4h ❌ Non Intensité faible. Les lipides assurent l’essentiel
IMC > 25 ❌ Non Réserves lipidiques importantes
Marathon ~3h ⚠️ Peut-être 10–30 g/h Glycogène + lipides couvrent la majorité des besoins
Ultra (> 6h) ✅ 10–30 g/h Stabiliser la glycémie sans détruire l’intestin
Élite < 2h30 ✅ 60–90 g/h Intensité élevée = besoin réel en glucides

La vraie question : dans quelle catégorie es-tu ?


Alimente-toi intelligemment.
Cours avec constance.
Sois celui qui termine.

Références

  1. Volek, J.S. et al. (2016). Metabolic characteristics of keto-adapted ultra-endurance athletes. Metabolism.

  2. Jeukendrup, A.E. (2017). Training the gut for athletes. Sports Medicine.

  3. Brooks, G.A. (2018). The Science and Translation of Lactate Shuttle Theory. Cell Metabolism.

  4. Burke, L.M. et al. (2011). Carbohydrates for training and competition. Journal of Sports Sciences.


Alvaro Madrazo

Par Alvaro Madrazo

Né au Mexique et basé en Europe depuis plus de 20 ans, Alvaro cumule 16 ans d’expérience dans le retail sport et alimentaire. Issu de la nutrition et du design produit, il allie compréhension scientifique et exécution terrain.

Ancien athlète et fondateur de Holyfat, il dirige aujourd’hui BRUTAL SALTY ENERGY, une marque de performance construite autour de la discipline, de la fonction et d’une authenticité assumée.

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